Cookies et navigation : la 11è plaie d'Egypte
Et si ce n'était qu'en Egypte... Warning cookies : ras-le-bol
CdG
Ce matin, en me levant (pour paraphraser le grand Marc-Aurèle) je me suis dit : "tiens, aujourd'hui, j'irais bien faire le tour de la concurrence" histoire de voir les nouveautés, les potins, bref, de me tenir au courant. je le fais de temps en temps et j'aime bien, mais je ne sais pas pourquoi, aujourd'hui il s'est passé un truc. Un déclic.
J'ai dû faire une vingtaine de sites en un peu moins de deux heures, en général plutôt sympas et franchement, c'est ahurissant de nuisance, de pénibilité absurde, le genre de celle qui ne sert à rien et dont on ne voit pas l'intérêt ; dont on voit encore moins l'intérêt qu'il n'y en a aucun, que s'il y en avait un il serait nul, je veux parler de la directive européenne qui oblige les webmasters à vous dire en grande pompe : "attention, j'utilise des méchants cookies, si tu n'es pas d'accord, tu dois partir", et où vous devez cliquer sur "ok" pour virer la fenêtre plus ou moins immonde car strictement inutile qui vous bloque une partie de la page.
Click sur "ok" dont le résultat est au passage enregistré dans un... cookie.
En d'autres termes, vous codez un petit cookie en JS qui indique que vous utilisez des cookies.
Il fallait quand même y penser, c'est le genre d'idée que jamais un individu normal n'aura.
Et ça, ça marche quand vous oubliez l'historique de votre navigateur : ceux qui nettoient tout tout le temps, qui naviguent anonymement, à chaque fois qu'ils vont sur un site, pof, warning cookie.
Sérieusement, qui douterait que cette abbération mentale n'est pas née dans l'esprit malade d'un bureaucrate bruxellois ?
A part les fayots ?
Personne.
Les deux ou trois premiers sites affichent leur petite div annonçant la couleur, et on clique. Au passage, le seul truc positif c'est de voir l'imagination des designers qui rivalisent d'efforts pour rendre agréable à l'oeil cette cochonnerie envahissante.
Mais ça n'arrête pas : à chaque nouveau site, une nouvelle annonce, avec un nouveau "ok" et un nouveau click (et au passage un nouveau cookie); à chaque site. Comme si à chaque site, on découvrait internet, le monde, la vie. Un nouveau départ ; une nouvelle expérience sans cesse renouvelée, "Un jour sans fin" revu à l'échelle de chaque écran (et sans la fabuleuse Andie MacDowell). Je me suis demandé sur le moment si ces gens vivaient dans le même monde que moi, ou moi dans le même monde qu'eux, assaillis par des armées de fichiers textes gavés de virus (en fait c'est pas possible) jusqu'aux dents et prêts à en découdre ?
Ami européen, auteur brillant de la directive 2009/136/CE relative à la protection des données des utilisateurs, je t'apprends que chaque site, (oui, ça fait des millions de milliasses) utilise des cookies, que ça ne sert à rien de prévenir le visiteur comme quoi "attention, ce site utilise des cookies" puisqu'il le sait, et/ou il s'en moque. Il semblerait que toi seul l'ignores, perdu dans ta tour de marbre, lévitant à 100 bornes au-dessus du vulgaire troupeau d'Epicure que nous sommes.
Et puis, il faut que je te le dise : un cookie, c'est gentil, c'est ton ami, il te veut du bien ; il ne peut pas endommager ton PC ; il peut éventuellement dire à ta moitié si tu traînes sur des sites louches, mais c'est la règle du jeu et dans tous les cas, ce n'est pas de sa faute si tu fautes (mouarff, bon ok..->[]). Au passage je t'informe que ça fait quand même clairement, nettement, indiscutablement, irréfragablement l'effet d'être pris pour une assemblée de crétins : Tu as dû être biberonné au "l'internaute est une brêle", ce n'est pas possible autrement.
Donc ce cookie, il va stocker tes centres d'intérêt wwwoulààà c'est grave.... Mais c'est aussi la règle du jeu. Et puis tu vas autoriser les bloqueurs de pub pour qu'ils ne t'affichent pas de pub cookisée d'après les centres d'intérêt que ta navigation aura mis à jour, vaste blague, Internet gratuit ça n'existe pas. D'ailleurs, ça me donne une idée de sujet : "comment débusquer les bloqueurs de pub", merci !
Bref, une fois fini mon tour d'horizon, non sans mal, je me suis quand même posé la question, à savoir si je devais en mettre une, de fenêtre d'avertissement ; on ne sait jamais, un client pointilleux, un visiteur en mal de délation... Aussi ai-je été me renseigner plus avant sur le site de la CNIL.
Alors là, c'est une énorme farce, le truc de fou, à mourir de rire...
Déjà, ça commence fort : la page datée du 30/12/2015 est obsolète ; je veux pas dire mais on est fin 2019 ; même mes sites sont plus à jour.
Ensuite, le délire commence : il faut informer le visiteur qu'il va prendre des cookies dans la figure, "obtenir son consentement" et lui donner un moyen de refuser. Bien entendu, de refuser tout en lui permettant de continuer à naviguer sur le site. Ben tiens, pourquoi met-on des cookies alors ? Ça donne quand même l'impression que le préposé qui a rédigé ça est en train de faire face à une menace nucléaire en pleine guerre froide. Eh, on parle de cookies, des petits fichiers textes complètement inoffensifs :
Ça c'est un cookie, cher lecteur :
6%2C%2C11%2C%2C14%2C%2C13%2C
Il veut simplement dire que vous n'avez pas (encore) voté pour ce brillant article ;-)
(en fait, plus sérieusement, %2C, c'est simplement l'encodage pour la virgule en UTF-8 pour les urls ; grosso modo, ça se lirait comme ça : ,6,,11,,14,,13, ce qui veut dire que le vote a été fait pour les pages avec l'id 6,11,14,13, et donc pas pour celle-là, qui a une id = 15. Bref, un genre d'ogive nucléaire en forme d'épée de Damoclès, attention... ;-)
Sans commentaire, plusieurs heures après j'en suis encore tout éberlué.
Une phrase m'a cependant interpellé, et plongé dans un abîme( pas trop profond) de perplexité : "ce bandeau ne doit pas disparaître tant que la personne n'a pas poursuivi sa navigation"
je dois dire que je l'ai lue deux fois, parce que la première fois j'ai pensé à une coquille. Mais, en y réfléchissant bien, l'équivalent parisien de mon ami bruxellois doit être tellement content de son affaire qu'il imagine que, ou bien la fenêtre va disparaître toute seule au bout d'un certain temps --risque considérable qui n'existe que dans sa tête-- (cf le stagiaire du dessus qui n'a que ça à faire que de jouer avec des setTimeout), ou bien elle dégage au premier click de navigation de la part de l'utilisateur. Du coup, et en bon français, ça signifie qu'en gros le warning cookie ne sert à rien, puisque naviguer sur le site vaut acceptation ; autant laisser naviguer le navigateur dans ce cas.
Alors, pour finir sur une note positive, je vais me coucher moins bête que je ne me suis levé ce matin car j'ai fait (quand même) quelques recherches et découvert l'existence de "I dont'care about cookies" : petite extension Chrome (site ici)qui marche pas mal, en gros 2 sites sur 3 ; du coup je l'ai adoptée, mais ma bonne volonté est quand même bien émoussée : est-ce que ça vaut la peine de mettre une div infâme sur mon joli site au risque de le défigurer, de coder un cookie ridicule pour prévenir un visiteur au moins aussi au courant que moi que mon site utilise deux (2) misérables cookies (ce qui fera donc trois) ? je ne suis plus très sûr.
** Depuis quelques temps, je vois fleurir de plus en plus un genre de truc qui s'en rapproche sous forme de plugin façon "cookjob by @Inc." avec l'option "config".(C'te blague)
Je dois avouer que je suis très dubitatif (litote) quant à l'intérêt de cette initiative : C'est toujours aussi pénible et en prime, non seulement ça semble délocaliser la gestion de choix persos à on ne sait qui, ça bouffe 30 secondes à remplir (quand on sait qu'on se bat pour gagner des millièmes de seconde) mais en plus, ça fait clairement l'attitude du gars qui trouve ça tellement important qu'il a décidé de ne pas s'en occuper lui-même.
Bref, encore pire que tout.
C'est complètement débile en plus d'être chiant en effet.